Pourquoi et comment changer de régime matrimonial ?
Lors de nos précédents articles, nous avons décrit les différents régimes matrimoniaux accessibles aux époux. Il faut à présent évoquer la possibilité de changer de régimes au cours du mariage.
Les besoins des époux peuvent évoluer au cours de leur union, il est alors important que les règles applicables et les pouvoirs des époux s’adaptent, eux-aussi, à la nouvelle situation.
Le changement de régime matrimonial est un acte important dans la gestion patrimoniale du couple. La communauté de biens réduite aux acquêts est le régime légal, applicable sans option au moment des époux lors du mariage.
Les besoins générant ce changement différent en fonction de la situation initiale. Cette évolution répond à des règles légales bien précises.
Dans quelle situation changer de régime matrimonial ?
Selon le régime de base, les intérêts du changement de régime peuvent être différents. Nous verrons ici les changements de régime les plus courants.
De la communauté de biens réduite aux acquêts vers la communauté universelle
Au cours de la vie conjugale les époux mariés sous le régime légal pourraient ressentir le besoin de changer de régime. Les raisons peuvent être variées : protéger le conjoint survivant, réticences face aux comportements des héritiers, unité patrimoniale. Les raisons sont variées et propres à chaque situation.
La création d’une communauté universelle de biens aura pour but d’augmenter les droits des époux sur les biens. Le but est de protéger le conjoint survivant au moment du décès.
Par ce changement, il sera propriétaire de la moitié des biens de la communauté. Les biens propres de chaque époux intégreront la communauté.
Une clause d’attribution intégrale des biens au conjoint survivant est généralement prévue. Par cette clause aucune succession ne sera ouverte au jour du décès du premier conjoint. Les biens de la communauté seront attribués au conjoint survivant.
Ce changement répond parfaitement au besoin de protection du conjoint.
En revanche, la succession du couple vers leurs héritiers ne sera pas optimisée. Hors cas de donations, les abattements disponibles en termes de transmission ne seront mobilisés que lors du deuxième décès.
Opter pour un régime séparatiste
Dans cette situation et à titre d’exemple introductif, un époux souhaite changer de statut professionnel et devenir microentrepreneur, libéral ou artisan. La création d’une entreprise a des conséquences directes sur le patrimoine des époux. Les biens peuvent être apportés en garantie ou saisis en cas d’impayés. Le changement de régime peut être une solution pour protéger le patrimoine de chacun.
Comme nous l’avons déjà évoqué dans nos articles, le régime séparatiste permet, par principe, de ne pas confondre les patrimoines des époux.
Les dettes et les créances sont propres à chaque époux et ne peuvent affecter le patrimoine du conjoint.
Dès lors l’époux ne pourra engager que les biens faisant partie de son propre patrimoine et non les biens de son conjoint.
A l’inverse en cas de difficultés financières de l’un des époux, seuls ses biens pourront garantir ses dettes. Les créanciers ne pourront pas se retourner vers les biens de l’autre époux (hors dettes contractées par la communauté).
Par exemple :
Un artisan peut engager une partie de ses propres pour comme garantir des prêts dans le cadre de son activité professionnelle. Les risques ne pourront affecter que ses biens engagés et non ceux de son époux.
En cas d’impayés ou de liquidation de son activité, seuls ses biens propres seront affectés. Les biens de l’époux ne pourront être appelés pour garantir les pertes et rembourser les créanciers.
A cette protection, on peut y adjoindre une autre protection : la déclaration d’insaisissabilité de la résidence principale.
Comment changer de régime ?
Outre l’opportunité du changement de régime, il faut s’intéresser à la procédure à suivre ainsi qu’aux recours possibles des tiers.
Les étapes de la procédure
Pour le Code civil, le changement de régime matrimonial doit être fait dans l’intérêt de la famille.
La loi de programmation et de réforme pour la justice, en vigueur depuis le 25 mars 2019, a supprimé la condition d’ancienneté de deux années d’application du régime matrimonial.
Concrètement, le changement de régime passe, comme pour le divorce ou le décès, par la liquidation du régime précédent. Ensuite, il est institué un nouveau régime. Un acte notarié est nécessaire.
La loi de programmation et de réforme pour la justice, en vigueur depuis le 25 mars 2019 :
Si un des époux est bénéficiaire d’un régime de protection des majeurs, il doit alors être autorisé au préalable par le conseil de famille ou par le juge des tutelles. L’assistance du majeur sous tutelle ou curatelle est nécessaire pour signer l’acte.
Le juge des tutelles peut être également saisi par le notaire si l’un ou l’autre des époux a des enfants mineurs.
Les parties dans le contrat modifié, les enfants majeurs, le représentant d’un enfant sous mesure de protection et les créanciers sont informés (annonce dans un journal d’annonces légales). En cas d’opposition, la nouvelle convention devra être homologuée par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance (TGI) du lieu de résidence de la famille.
Devant le TGI, la représentation par avocat est obligatoire.
Le juge doit apprécier les conditions définies par l’article 1397 du Code civil :
– Si le changement est dans l’intérêt de la famille ;
– Si chacun des époux est consent au changement ;
– Si les créanciers ne seront pas lésés par ce changement.
Le changement n’interviendra que trois mois après que mention en a été portée en marge de l’acte de mariage (ou dans les conventions passées par les époux dans lesquelles il est fait mention de ce changement).
Le changement n’interviendra que trois mois après que mention en a été portée en marge de l’acte de mariage (ou dans les conventions passées par les époux dans lesquelles il est fait mention de ce changement).
En conclusion, le changement de régime doit s’apprécier dans une globalité patrimoniale. Ce changement répond à des objectifs ou des besoins précis. Les conséquences sont importantes et nombreuses. Les coûts de la modification et de la liquidation du régime doivent être envisagés en amont et dépendent du patrimoine de chacun.
Le service Transmission & Patrimoine pourra répondre à vos différentes interrogations et échanger avec vous de l’opportunité de changer de régime matrimonial.
Charles Volmerange, juriste – service Transmission & Patrimoine
Mis à jour le 20/07/2022 par Natacha Bordeaux, juriste – service Transmission & Patrimoine
Sources : Code civil, article 1397 ; article 1300-4 Loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.